Extrait de « Croquis scientifiques et Philosophiques » — François Jollivet-Castelot
1912
« Notre précédente note indiqua dans ses grandes lignes la doctrine de l’Évolution Universelle, d’après la Chaîne de Vie exposée par l’Occultisme. L’unité de l’Essence étant admise pour tous les êtres de la Nature — sous leurs formes innombrables — il en résulte immédiatement que chaque monade, chaque parcelle du Tour constitue un rouage de la Grande Mécanique, subit dès lors les oscillations cosmiques, de même qu’elle réagit à son tour sur toutes les autres cellules constitutives.
La solidarité absolue des êtres possède donc la rigueur d’une Loi aujourd’hui reconnue (Darwin, Spencer, Haeckel, au point de vue positiviste). Tout être incarnant une essence identique à celle de ses frères, essence perfectible indéfiniment, en tension vers un perpétuel Devenir — la Solidarité parfaite, le Principe d’Amour général se présentent avec la logique d’un théorème.
L’évolution collective dépend — en outre des facteurs spéciaux — de la progression individuelle, et vice-versa. Il faut donc, afin de hâter la marche, s’aider mutuellement, s’oublier pour les autres qui doivent s’oublier pour vous.
Mais, dira-t-on, si l’on érige l’Amour en loi, en nécessité, il perd sa spontanéité enthousiaste et désintéressée, ce n’est plus là l’Amour.
Nous répondrons : l’Amour n’est perçu encore que par de rares esprits évolués, parvenus à un état supérieur (ascètes, moines, saints, penseurs, adeptes) leur permettant d’embrasser mieux la Vie. L’Humanité ignore le Principe d’Amour. Elle ne sait point que l’être doit forcément dépouiller, à une époque, sa personnalité, mourir à l’Égoïsme, pour naître, par le sacrifice total, à l’existence spirituelle.
Tant que l’Égoïsme restera le lot des individus, les individus seront misérables, en proie à la douleur, au mal, à l’emprise des planètes infernales. Pour que la Terre s’améliore, que le Vice disparaisse, et la Barbarie et les Guerres, il faut que la Loi d’Amour triomphe, que la Solidarité se comprenne. A l’Occultisme incombe le rôle de propager cette vérité perceptible au moyen de l’Hylozoïsme et de l’Unité.
Nous pouvons ainsi formuler cette Loi : « Tous les êtres étant frères, égaux — de par leur Unité — doivent s’aimer, se soutenir, aider à leur progression mutuelle en raison de leur intellectualité et de leur degré d’évolution. Tous les êtres sont frères, avons-nous écrit ; donc non seulement l’Amour et la Pitié s’imposent envers les hommes, mais les hommes doivent étendre ce sentiment aux animaux, à toute chose, puisque tout vit et évolue, forme une Unité.
Bonheur réel au Monde, car chaque perception se répercute au loin comme le mouvement dans la mer éthérique, la sensation dans notre organisme. Une même Loi dirige l’Univers, un seul Principe se manifeste au travers des formes. Le Bouddhisme ésotérique repose sur cette assurance, et l’Ascétisme, et la sainteté de tout culte.
Toujours les mystiques enseignèrent cette fraternité, proclamèrent le Monde un Organisme.
Toutes les cellules, on le sait en Biologie, dépendent les unes des autres.
Or l’Égoïsme est un poison, un virus. Il tue, dissout.
L’Amour vivifie, coagule.
L’Évolution morale repose par conséquent sur l’Amour. »